Faîtière des femmes de l’AES : quel progrès possible sur l’inclusion des femmes dans les prises de décision
En marge de la commémoration de la Journée Panafricaine des Femmes, le 1 août 2024 à Bamako, les Ministres en charge de la promotion de la Femme et du Genre, de la Confédération des États du Sahel (AES), ont décidé de la création de cette plate-forme des organisations faîtières des femmes de l’AES. Une initiative bien saluée par les femmes, du fait qu’elle tombe pendant que les organisations féminines et de défense des droits des femmes sont au four et au moulin pour l’implication des femmes aux différents processus de prise de décision dans ces pays.
Adhérant beaucoup à l’idée, Me Kadidia Sangaré, Ancienne ministre et membre du CNT trouve que si les femmes de l’AES se mettent ensemble, cela ne pourra que renforcer la promotion des femmes. « Quand les oiseaux s’associent, ils font plus de bruit et on les entend mieux », a-t-elle cité comme pour dire que l’union fait la force. « J’appuie beaucoup ce projet car les femmes maliennes vont à coup sûr en profiter » s’est-elle réjouie.
Par ailleurs, du fait qu’une multitude d’organisations existent déjà dans l’espace de l’AES avec quasiment les mêmes objectifs, certaines femmes d’organisations de la société civile proposent pour la plate-forme des femmes de l’AES, un contenu différent permettant à la nouvelle faitière des femmes de l’AES d’avoir des missions plus spécifiques.
C’est le cas de Mme Ramata Diakité, Directrice exécutive de la Fédération nationale des jeunes filles et femmes pour leur autonomisation qui souligne qu’il y’a suffisamment d’associations et de plates-formes qui œuvrent pour la promotion et la défense des droits des femmes au Sahel. Parmi ces organisations, elle cite l’Alliance Sahel, les femmes du G5-Sahel, même si cette dernière tend à disparaître avec le G5-Sahel, les Ailes du Sahel, les femmes parlementaires et ministres de la zone francophone qui font toutes, selon elle, beaucoup d’actions au Sahel. « Si on essaie de voir toutes ses structures qui font régulièrement des actions et des plaidoyers par rapport aux besoins spécifiques des femmes dans le sahel, on va dire que la plate-forme des femmes de l’AES sera une plate-forme de trop » déclare-t-elle.
Progrès possible sur les questions de coopération, de justice et de gouvernance
Contrairement à elle, Ousmane Keita, Enseignant chercheur à la FSAP (Doctorant en Relations internationales) rassure que l’initiative du Burkina Faso, du Mali et du Niger de mettre en place une faîtière commune des femmes est bien logique dans la mesure où elle va au-delà de la simple coopération, à la différence de l’intégration, pour relever les défis communs en face. Parmi les défis de l’AES, notre juriste évoque l’insécurité, la mauvaise gouvernance, l’injustice entre autres. Monsieur Keïta estime que les femmes ne peuvent pas être écartées dans aucun de ces processus.
D’ailleurs, il signale qu’aucun développement n’est envisageable sans l’implication des femmes. Pour pouvoir gérer l’insécurité qui fut la cause principale de la création de l’Alliance (AES), selon lui, on a besoin des femmes. Les femmes ont un grand rôle, selon lui, pour vaincre l’épineuse question de l’enrôlement des enfants dans les organisations criminelles et du terrorisme. Pour le chercheur, c’est une chose que les dirigeants de l’AES ont bien compris.
Progrès dans la résolution de l’insécurité et des conflits
Dans la même lancée, Mme Doumbia Mama KOITE, Présidente de la Plate-forme des Femmes Leaders du Mali explique que les femmes sont les principales victimes des conflits et ce sont elles qui subissent encore les plus lourds préjudices. De ce fait, selon elle, les femmes ont leur place autant dans la prévention que la gestion des crises sécuritaires au Sahel. « Elles doivent participer à la gestion, aux négociations des conflits. Elles ont besoin de protection et doivent être intégrées dans les programmes de relèvement économique », recommande la Présidente de la Plate-forme des Femmes Leaders du Mali. Émue par cette initiative, Mme Doumbia rassure que les femmes sont déterminées à soutenir ce choix politique de leurs Chefs d’État tout en restant disposées à mettre en place, dans les jours à venir, des mécanismes nationaux et inter-Étatiques de l’AES.
Interrogée sur la question, Mme Djingarey Maiga, chargée de mission au ministère de la promotion de femme, de l’enfant et de la famille soutient que les départements en charge de cette question au Mali, au Burkina Faso et au Niger travaillent déjà de façon à atteindre les objectifs cités dans le communiqué conjoint de leur ministre le 1 août 2024.
Dans ce communiqué conjoint, les trois les ministres en charge de la promotion de la Femme et du Genre ont motivé la création de cette plate-forme pour « réaliser des activités communes pour une plus grande participation des femmes dans la mise en œuvre de la vision des Chefs d’État de la Confédération des États du Sahel », une thèse qui vient appuyer le point de vue avancé par Ousmane Keita.
L’accès suffisant à l’éducation et la lutte contre les inégalités basées sur le genre
Saluant également la décision, Mme Diodo Diallo, membre du Réseau National des Jeunes du Mali (RENAJEM) a par ailleurs proposé d’être beaucoup plus regardant sur la promotion de l’égalité des droits entre les sexes aux côtés de l’inclusion croissante des femmes dans les prises de décision. Selon elle, Il faudrait même aller vers la parité entre les hommes et les femmes et encourager des changements culturels pour éliminer les stéréotypes en milieu professionnel faisant croire que les femmes sont moins aptes à occuper des postes de responsabilité autant que les hommes. Mme Diodo Diallo propose ensuite la promotion de l’accès des filles et femmes à une éducation de qualité ainsi qu’aux opportunités de formations dans des secteurs dominés par les hommes dans l’AES.
Issa Djiguiba
« Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les Droits humains au Mali (JDH) et NED »