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ABDOULAYE MAIGA A L’AG DE L’ONU : UN DISCOURS 3.0 ENTENDU ET ECOUTE DANS LE MONDE

Alors que l’éditorialiste de l’hebdomadaire Jeune Afrique tente de le discréditer au vitriol, le discours du Premier ministre par intérim du Mali a été l’un des plus écoutés et entendus depuis la tribune de la 77e AG de l’ONU. Un discours qui colle à son époque, comme le démontre le nombre de vues sur la chaine YouTube de l’ONU elle-même.

Le passage du Premier ministre par intérim du Mali aura marqué les esprits à la tribune de la 77è session de l’Assemblée générale des Nations unies. Il n’était ni le premier dans l’ordre ni le dernier, ni le plus court, encore moins le plus long. Mais les 34 minutes d’Abdoulaye MAIGA, voix du Mali ce samedi 24 septembre 2022 à partir de 13h20, ont retenti dans les quatre coins du continent africain, de la savane à la forêt, des côtes maritimes aux sources ou confluents des fleuves, des montagnes aux plaines. Et bien au-delà du continent ! Il est retentissant pour les uns, historique pour les autres, choquant pour les plus critiques. Comme le dirait l’autre, le PMi malien n’est pas allé de main morte. Il a semblé « tirer sur tout ce qui bouge ». La trame du discours est restée dans l’affirmation de la souveraineté du Mali, l’assumation de ses choix et la détermination à prendre le chemin du progrès dans le concert des nations.

Le Chef du Gouvernement par intérim du Mali a, peut-on le dire avec argument, ravi la vedette à certains chefs de délégations représentant les pays réputés plus grands, plus puissants, aux Chefs d’états et de gouvernement réputés d’habitude plus stridents, plus « caustiques » dans le verbe. La salve presque léthale en critique de ce discours du chef de la délégation malienne est venue de Jeune Afrique, sous la plume de son éditorialiste François Soudan. « Plutôt que d’être écouté, Abdoulaye MAIGA a jugé préférable d’être entendu, sûr de son effet auprès des militants de Yerewolo. Le populisme et la paranoïa ont toujours fait bon ménage… » peut-on lire dans son papier aux relents de réquisitoire d’un titre de presse au secours de son « logeur, parrain, promoteur et protecteur » français sur fond de défense de la démocratie en péril.

En 77 ans de vie, l’ONU a dû archiver une belle panoplie de discours historiques autant sur le plan de la verve que de la richesse du contenu, du sarcasme ou encore de la longueur. On citera le leader cubain Fidel Castro le 26 septembre 1960 avec ses 4h29 de discours « pour dire la vérité », le russe Nikita Khrouchtchev, à la même session, en colère tapant sa chaussure sur la table, l’américain Reagan a lui fait peur en 1987 avec une idée bizarre d’attaques d’extraterrestres pour résoudre les tensions entre puissances mondiales en pleine guerre froide ; la qualification par le libyen Mouammar Kadhafi en 2009 du Conseil de sécurité des Nations Unies comme un « Conseil pour le terrorisme ».

La plupart de ces discours, des plus entendus et lus au plus ignorés se sont déroulés à une époque où la circulation de l’information était lente et lourde, où les débats de l’AG de l’ONU semblaient pour le citoyen lambda du monde comme une messe de diplomates dans un coin lointain du monde, une occasion de virée officielle au pays de l’oncle Sam, où les discours étaient destinés aux initiés.

Et pourtant, le discours du Premier ministre par intérim malien, au regard de son époque, peut sans conteste être considéré comme l’un des plus importants et des plus populaires de cette 77e assemblée générale de l’ONU. Il a été écouté et entendu. Si avant l’avènement d’internet, on se battait pour être écouté par les autres participants à la grande messe dans la tour de verre de Manhattan, aujourd’hui, vous pouvez être écouté dans une salle vide mais l’être très bien dans une chambre d’hôtel ou un avion dans le ciel.

Un petit détour sur la chaine YouTube de l’Organisation des nations unies le démontre aisément. Le discours du Mali a été le plus regardé de tous les discours lus par les chefs de délégations africaines avec plus de 683 mille vues. Si le critère démographique peux expliquer les plus de 2 millions de vues du discours du chef de la délégation indienne, ce n’est pas non plus le taux de pénétration internet du Mali (11%) qui va expliquer la forte audience du discours malien sur internet et précisément sur la plateforme YouTube de la première organisation politique au monde qu’est l’ONU. C’est qu’il n’a pas été seulement vu par ses concitoyens maliens, mais par bien de citoyens africains et du monde séduits par courage et la prestance de la posture malienne. Dans le Top 5 du classement africain, on retrouve à la suite du dirigeant malien, le président zambien dont le discours a été plébiscité par plus de 500 mille vues avec des commentaires de la vidéo faits pour la plupart par des internautes d’Afrique australe, une région à forte pénétration internet en Afrique ; suivent le congolais Tchisekedi avec 229 mille vues, le sénégalais Macky SALL avec 186 mille vues, le nigérien Bazoum avec 134 mille vues. Le Mali a fait mieux dans ce domaine que les chefs de délégation des pays développés comme les USA avec Biden (297 mille vues), Macron de France (51 mille vues environ), le chef de la diplomatie chinoise est à 130 mille vues.

C’est dire combien le discours du chef de la délégation malienne est dans l’air du temps, en phase avec son époque, entre numérique, multimédia et cybernetique. C’est un discours 3.0, au-delà même du 2.0, une norme désormais qui tombe en désuétude. La viralité d’un document sur internet repose sur l’intérêt que les premiers utilisateurs en font, à travers les partages. Ce discours du Premier ministre malien par intérim a été entendu, écouté, vu à travers des gestes de notre époque à savoir les likes, les partages et les commentaires. C’est-à-dire là où les grands médias comme Jeune Afrique, contre la version papier moins prisée, partent aujourd’hui chercher leur notoriété, pour être lus, vus, entendus et écoutés.

A-t-on besoin d’expliquer que le ton donné au discours du Mali, le contenu syntaxique, le style rhétorique ont été bien réfléchis ? Ce discours avait des objectifs et le choix de la tribune a aussi été bien muri. Chaque chef de délégation avait la liberté de parole et de dessein de son discours.

Ce qui est à retenir c’est que les discours du Mali en 2021 et 2022 à l’ONU ont fait tilt et c’est tout le bien qu’il faut retenir dans un exercice où plus de 190 pays doivent se succéder pour passer un message au reste du monde, où les pays africains pour la plupart sont considérés comme des figurants inscrits pour l’applaudimètre des supposés plus puissants.

Le Mali a brillé, resonné et apparemment assourdi si ce n’est abasourdi certains qui pensaient détenir le monopole des premières loges dans l’audimat international. Le Mali est en phase avec l’évolution actuelle du monde, entre turbulences et mutations, virant de l’unipolarité à la multipolarité. De ce point de vue, le Mali comme tous les autres pays, cherchent le meilleur point d’ancrage, dans l’action et dans le discours.

Alassane SOULEYMANE,
Journaliste-
Ancien Rédacteur en chef de radio Mali,
Ancien Conseiller à la Primature

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